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Dans cet article nous chercherons à analyser certains apports juridiques de la nouvelle directive de manière plus approfondie. Cela nous permettra de comprendre le raisonnement de la Commission européenne dans la modernisation du droit d’auteur mais aussi sa propre position dans la matière.
Rappel des apports de la proposition de directive
La proposition de la « Directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique » introduit des nouveautés dans le paysage des droits d’auteur. Comme nous l’introduisions dans notre premier article, les grands apports sont :
- une harmonisation plus poussée des droits d’auteur pour tenter de mettre fin au problème de la territorialité nationale des régimes de propriété intellectuelle ;
- de nouvelles définitions pour certains termes déjà existants et une clarification de certains aspects ;
- un nouveau droit accessoire pour les éditeurs de presse ;
- trois nouvelles exceptions en ce qui concerne les fouilles de textes et de données, l’enseignement et le patrimoine culturel ;
- un rôle plus important pour les prestataires de services ;
- une meilleure définition de la responsabilité des hébergeurs sur le Web. La Commission européenne propose une obligation de « filtrage » pour les plateformes internet (nous y reviendrons) ;
- un mécanisme de plainte et de collaboration qui devra être assuré par les prestataires de services sous le contrôle des différents Etats membres ;
- la mise en avant de l’importance de la négociation des licences et des rémunérations entre les titulaires de droits et leurs partenaires contractuels.
Analyse de certaines dispositions de la proposition de directive
La proposition Directive promet de nouveaux apports dans la matière. Nous allons passer en revue différents articles qui ont fait l’objet de modifications et de projets d’avis :
- l’article 2 concerne les définitions de différents termes utilisés dans la Directive ;
- l’article 3 établit un régime d’exception pour trois domaines différents : la fouille de textes et de données, l’enseignement et la préservation du patrimoine culturel ;
- l’article 11 de la proposition de Directive concède un nouveau droit accessoire aux éditeurs de presse. Ce droit ne pourra porter atteinte aux droits d’auteur et autres titulaires. Les éditeurs de presse obtiennent un droit de reproduction conformément à l’article 2 de la directive 2001/29/CE ainsi qu’un droit de communication d’oeuvres au public prévu par l’article 3 de la même directive. Ce droit est protégé pendant une durée de 20 ans (nous y reviendrons dans un prochain article) ;
- l’article 13 concerne l’utilisation de contenus protégés par des prestataires de services de la société de l’information qui stockent et donnent accès à un grand nombre d’œuvres et d’autres objets protégés chargés par leurs utilisateurs. Cet article établit non seulement un mécanisme de plainte mais aussi un système de coopération entre les prestataires de services et les titulaires des droits avec le soutient des Etats membres qui devront assurer la mise en place de moyens adéquats. Cet article prévoit aussi un mécanisme de filtrage sur les plateformes internet ;
- l’article 14 se rapporte à l’obligation accrue de transparence et d’information vis-à-vis des différents titulaires de droits de la part des personnes qui utilisent leurs oeuvres ;
- l’article 17 concerne la modification de certains aspects dans les directives précédentes en matière de droit d’auteur. Des notions ou des termes se sont vus redéfinis. C’est donc une disposition qui est source de difficultés. L’article 17 régule également la relation entre les nouvelles exceptions et celles qui existaient déjà auparavant.
Présentation de certains considérants à retenir
Des modifications diverses ont également été formulées à plusieurs reprises pour les considérants de la nouvelle Directive notamment pour éclaircir certaines définitions. Les considérants qui ont retenu le plus notre attention sont les suivants :
- les considérants 8 à 13 en rapport avec la définition de la nouvelle exception relative à « la fouille de textes et de données » (« text and data mining ») ;
- le considérant 37, en rapport avec l’article 13 de la proposition, rappelle que les services en ligne qui donnent accès à des contenus protégés par le droit d’auteur mis en ligne par leurs utilisateurs sans la participation des titulaires de droits se sont multipliés. Ces services ne permettent pas aux titulaires de droits de savoir si leurs œuvres sont utilisés et dans quelles conditions, et d’obtenir ainsi une rémunération appropriée en contrepartie de cette utilisation ;
- le considérant 38, toujours en rapport avec l’article 13 de la proposition, est LE considérant qui est l’objet de la plupart des critiques des commentateurs. En résumé, il précise que, dans le cas où l’article 13 entre en vigueur, les prestataires de services de la société de l’information qui stockent et proposent au public des œuvres ou autres objets protégés par le droit d’auteur chargés par leurs utilisateurs et qui vont au-delà de la simple fourniture d’équipements et de l’acte de communication au public, ils seront tenus de conclure des contrats de licence avec les titulaires de droits, à moins qu’ils ne puissent bénéficier de l’exemption de responsabilité prévue à l’article 14 de la directive n° 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil. De plus, ces services devraient prendre des mesures appropriées et proportionnées pour assurer la protection de ces œuvres et autres objets protégés, par exemple par la mise en œuvre de technologies efficaces ;
- le considérant 39, qui complète le considérant 38, crée une obligation de collaboration entre les titulaires de droits et les prestataires de services, essentielle au bon fonctionnement des technologies qui seraient mises en place pour assurer la protection des œuvres protégées qui sont stockées et proposées au public par l’intermédiaire de ces services de la société de l’information.
Jusqu’à présent différentes commissions spécialisées (protection des consommateurs, enseignement, industrie ….) ont communiqué leurs projets d’avis mais aucun n’était dans la direction voulue par la Commission européenne. Derrière ces dispositions, il y a une orientation politique et des compromis à prendre en compte.
Conclusion
Cette autopsie n’est pas exhaustive mais elle permet d’une certaine façon de comprendre les difficultés et les problématiques issues de cette proposition de Directive. Depuis son dépôt en 2016, elle fait toujours l’objet de différentes modifications et révisions. Un accord est laborieux à trouver. Encore un peu de patience !
Certaines des dispositions font l’objet d’un nombre considérable de critiques, que nous développerons, plus en profondeur, dans des prochains articles.
Auteure invitée: Gara San Juan (@Garasjk)
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